Beauregard

Roland Niaux

(ca 2000)

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Beauregard, commune d’Arleuf, dans la Nièvre, était autrefois une seigneurie ayant toute justice, et mouvant du compté de Château-Chinon.

Son histoire est assez bien documentée par les auteurs régionaux à partir du XIVe siècle. Ses seigneurs, ont, semble-t-il, toujours appartenu aux familles de la Tournelle ou de Montjeu, ou bien ont été alliés à ces familles.

La seigneurie de Beauregard avait une maison forte bâtie, selon l’Abbé Jean-François Baudiau[1], sur les ruines d’une villa gallo-romaine : on y aurait trouvé des monnaies du 1er au IVe siècles, des fragments de vases antiques et des tuiles à rebords, caractéristiques des constructions gallo-romaines. De son côté, Lucien Olivier[2] intègre Beauregard dans l’ensemble gallo-romain du bassin d’Arleuf : le Théâtre des Bardiaux n’en est qu’à 1 500 m (pour ma part, je n’ai trouvé en prospection au sol que des tessons de céramique noirâtre médiévale).

Beauregard apparaît pour la première fois dans les textes et sous ce nom, dans un partage daté de 1357 (Baudiau III). Le toponyme se rattachant à notre langue actuelle. Beauregard ne doit pas être bien antérieur à cette date. Etienne de la Tournelle, chevalier, en était seigneur en 1378. La Tournelle, une des plus puissante seigneurie du Morvan, avait son château sur la commune d’Arleuf, dans une boucle du ruisseau de la Mothe, à 400 m au Sud de l’actuel château et à 3 km de celui de Beauregard qui en était un probable démembrement.

En 1444, Hugues et Jacques du Bois, écuyers, seigneurs de ce lieu (La Tour du Bost) et d’Ausserain (Auxerain, château aujourd’hui ruiné, dans un bois de la commune de Vievy) reprennent le fief pour le château de Beauregard, « fossés séans à l’environ d’iceluy et dépendances » (Baudiau I).

Selon un autre dénombrement donné en 1457 par Philippe de la Tournelle[3], la terre de Beauregard avait pour habitation « une maison basse entourée de fossés et trois toises de terre au-delà de ces fossés, avec la grange, les courtils, aisances et appartenances, tenant en partie au bois du Plessis de Beauregard, un étang au dessous de la maison, avec les moulin, battoir et fours banaulx, et la rivière de Beauregard, de garde depuis la planche de Pers ».

Le terme « plessis » rappelle la haie plessée selon la méthode traditionnelle, qui devait protéger motte et basse cour au delà des fossés.

En 1571, aux termes d’un dénombrement donné par Philippe de Montjeu, seigneur d’Antully, Beauregard n’est plus « qu’une maisière et muraille où estoit le châtel et thoises de terre à l’entour ». En ajoutant les droits de dépendances en terres et prés, le quart du bois de Folin, 70 hommes et femmes taillables et corvéables en main morte, 80 deniers de rente, 7 mailles, 47 boisseaux de seigle « pour pain ez chiens » ; 18 gelines et 8 deniers de paisson « pour quatre porcs », on apprécie l’importance toute relative de cette seigneurie de l’aube des temps modernes.

La ruine de la maison forte se situe donc entre 1457 et 1571 : son seigneur habitant la Tournelle ou Antully, n’y résidait plus.

A Beauregard était attachée une chapelle, dédiée aux saints Jacques et Philippe. Cette chapelle, « en tête d’un bois, et fort ancienne », était le but des processions au 1er mai, depuis l’église d’Arleuf. Elle ne fut démolie qu’en 1788 (Baudiau). Près de cette chapelle était une fontaine « de la Bonne Dame », qui, elle aussi, attirait de nombreux pèlerins, dans le cadre des pélerinages à Faubouloin.

Les vestiges de la maison forte de Beauregard sont aujourd’hui cachés dans le bois de ce nom, au milieu des résineux, à 2 200 m environ à l’Ouest-Nord-Ouest de l’église d’Arleuf et au Nord de la D 978.

Photo Roland Niaux

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Il n’existe aucun chemin pour y accéder. La lisière Sud du Bois de Beauregard est bordée par l’un des tracés de la voie romaine d’Autun à Entrains qui, au Moyen-Âge, était toujours pratiquée.

La motte sur laquelle reposait la maison est circulaire, bombée, taillée dans la roche en surplomb de la profonde vallée dans laquelle coule un petit affluent de l’Yonne, le ruisseau dit de Beauregard.

Cette motte est bordée d’un talus formant une sorte de chemin de ronde, motte et chemin mesurant (mesures prises au pas) environ 50 m de diamètre et 150 m de pourtour. Elle présente à son sommet une dépression d’environ 20 m de diamètre décentrée vers le Sud, peut être une citerne ou d’anciennes caves. Motte et talus sont entourés sur un peu plus de la moitié du périmètre, côté forêt, par un fossé profond et large d’environ 10 m. Vers le Nord-Est, le fossé fait place à un à-pic de 50 m sur le ruisseau de Beauregard. L’accès à la motte se faisait par un chemin bordant l’à-pic vers l’Est. Vers l’Ouest, une terrasse s’étend sous le fossé, sans doute les « trois toises de terre » dont parlent les dénombrements. Juste au pied de la motte, le long du ruisseau, on retrouve les ruines du moulin au milieu d’une abondante végétation. Un peu à l’Ouest du moulin, sur un replat de la rive gauche du ruisseau, un vague pierrier serait les ruines de la chapelle, selon les témoignages d’habitants voisin. Quand à la double fontaine de la « Bonne Dame », il y a tout lieu de penser que ce soit la belle fontaine à double bassin du hameau des Robins, à 500 m au Nord du ruisseau et en tête d’un chemin descendant au pied de la motte.

© Roland Niaux, ca 2000 (Publication électronique : Mai 2006)

Voir aussi l'article : Arleuf (Nièvre)

Précisions bibliographiques :

- J.-F. Baudiau, Le Morvan, T I, 3e éd., Paris, Guénégaud, 1965, p. 446, 448, 482.

- Abbé Doret et A. de Monard, « Monjeu et ses seigneurs », MSE, IX, 1880, p. 77, 82, 83 ; MSE XXVII, 1899, PV des séances, p. 408.

- J.-G. Bulliot, La Tour de Bost, M.S.E., XXIX, 1901, p. 372-373.

- L. Olivier, Le Haut Morvan Romain : voies et sites, Académie du Morvan, 1983, p. 106.

[1] J.-F. Baudiau, Le Morvan, T I-III, 3e éd., Paris, Guénégaud, 1965.

[2] L. Olivier, Le Haut Morvan Romain : voies et sites, Académie du Morvan, 1983.

[3] J.-G. Bulliot, La Tour de Bost, M.S.E., XXIX, 1901.

viviane niaux, éditeur

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